Pourquoi Jean-Jacques Goldman n’a jamais trop cité Pink-Floyd ou le rock progressif en références ou influences musicales, alors qu’il nous a laissé tellement d’indices au cours de sa carrière ?
Lors d’interviews, Jean-Jacques Goldman a souvent parlé de Ferré, Dylan, Aretha Franklin ou Status Quo en influences ou références musicales.
Je n’ai aucun souvenir de l’avoir lu ou entendu parler de Pink Floyd qui l’aurait influencé de quelque manière que ce soit. Je me suis penché sur la question, car trop d’éléments flagrants penchaient pour prouver que Pink floyd, tête de file du Rock progressif, avait dû être un groupe que Jean-Jacques Goldman avait pas mal écouté dans les années 60-70, lui qui a fait partie de Tai Phong, un groupe de rock progressif des années 70, avec lequel il a eu un premier succès et ses premières vraies sessions d’enregistrements studio.
Analyse et solides arguments pour appuyer cela.
Ce n’est pas facile d’écrire sur Jean-Jacques Goldman, non pas que je n’ai pas de thématique ou d’idées sur le sujet et le personnage, mais j’ai toujours cette admiration, ce respect envers lui, qui date des années 80. Les gens qui me connaissent savent que je l’ai rencontré un certain nombre de fois, et que j’ai pu l’interviewer à plusieurs reprises dont notamment sur sa dernière tournée.
Il y a tellement de thématiques, de sujets qui me taraudent le concernant, que je ne sais jamais par où commencer et surtout, je ne veux pas trahir le souvenir que j'ai de lui, et le faire parler sur des sujets qu’il n’a pas trop abordés, même si à force, on peut parfois anticiper, ou prévoir ce qu’il penserait ou dirait sur certaines thématiques.
Je dois revenir à la genèse de ma réflexion, et de ce que j’ai remarqué, pour bien expliquer mon propos et l’orientation de celui-ci. J’ai pas mal écouté le dernier album de David Gilmour récemment vu qu’il venait de sortir, mais aussi son live à Pompeii, ses récentes prestations scéniques, et d’autres albums de Pink Floyd, et le jeu de guitare, les montées, les solos me faisaient penser vraiment à certains de ceux de Jean-Jacques Goldman. Ce n’est pas anormal, des montées dans les aigus en guitare sont souvent sur les mêmes notes, mais le jeu de guitare, le toucher, le son, me rappelaient vraiment certains titres studios mais surtout enregistrements live de Jean-Jacques Goldman. Non ce n’était pas une transposition, tous deux sont d’excellents guitaristes, je dirai même tous trois, car je dois inclure Michaël Jones évidemment, qui est plus que présent sur certaines parties studios mais surtout sur les titres enregistrés et joués en concert.
L’intro de “Puisque tu pars”
Et puis je me suis souvenu de cet élément que je n’avais pas oublié mais dont je n'avais jamais eu aucun élément de réponse tangible de la part de l’intéressé. Ces 15 secondes d’intro de “Puisque tu pars” qui étaient soient une reproduction exacte ou un sample d’une partie du titre de Pink Floyd “Is there anybody out there”, titre mystérieux et envoutant d’une beauté incroyable qui commence avec ces sons de synthétiseurs, cette voix terrifiante et qui débouche sur une magnifique pièce acoustique de guitare acoustique et de cordes. J’imagine donc que Jean-Jacques Goldman a voulu nous envoyer un message, faire référence à ce titre qui a dû le marquer alors qu’il avait 28 ans lors de la sortie de l'album mythique “The Wall”.
Peu de références sont disponibles sur internet, c'est mentionné dans Wikipedia, je ne suis donc pas le seul à voir fait le lien, entre ces deux titres, mais je n’ai jamais lu ni entendu Jean-Jacques Goldman parler de cela, et ce sera toujours une question que je rêve de lui poser.
Car cela ne peut être un hasard, on parle de plusieurs nappes de synthés en même temps, et aussi de voix, de sons, qui sont identiques sur les deux titres. Aucune mention n’est faite sur les crédits. Seuls Jean-Jacques-Goldman, Andy Scott, Roland Romanelli ou Marc Lumbroso pourraient nous donner une réponse, sachant que Joe Hammer qui était sur le Fairlight CMI sur ce titre, est décédé depuis.
C'est en effet frustrant de ne pas avoir de version officielle sur cette similitude, car cela laisse place à toutes les suppositions, mais il est clair qu’à l’oreille, on est plus en face d’un sample que d’une imitation dans ce cas-là, et il est peu probable que cela n’ait pu se faire sans l’autorisation du groupe Pink Floyd ou de Roger Waters directement, étant donné que c’est lui l’auteur compositeur unique de ce titre.
Ma démarche n’est absolument pas de dire que Jean-Jacques Goldman a utilisé cette partie du titre de Pink Floyd pour l’intro de “Puisque tu pars”, c'est plus de me demander pourquoi, mais surtout, spécifiquement sur ce titre qui fait plus de 7minutes 30 sur la version studio originale. Car c’est un fait, quiconque qui a un minimum d’honnêteté et d’oreille, saura reconnaître cela.
Selon moi, Jean-Jacques Goldman et l’équipe qui ont travaillé sur le titre pour les arrangements, ont eu cette idée pour créer cette ambiance, ce mystère autour de l’intro. Et rappelez-vous bien, on est en pleine période de l’utilisation des synthétiseurs qui peuvent créer des sons, des ambiances qui illustrent tellement cette période musicale.
L’album Entre gris clair et gris foncé, un autre signe supplémentaire
Le titre “Puisque tu pars” est tiré de l’album “Entre gris clair et gris foncé” et c’est en réécoutant cet album que je me suis mis à penser de plus en plus à cette thématique. Car sur cet album, il y a “Peur de rien blues” et pour moi cela a été une révélation ensuite.
Je crois pouvoir dire en fait que Jean-Jacques Goldman était le meilleur représentant en France du rock progressif anglais. Et si l’on n'écoute rien que ces deux titres, “ Puisque tu pars” et “ Peur de rien blues”, cela me semble évident. Ce qui caractérise le rock progressif, c’est une certaine complexité musicale, avec des changements de rythme, des morceaux plus longs, une fusion des genres et l’utilisation de synthétiseurs, cordes flûtes et aussi des passages plus complexes et techniques comme des solos et des longs instrumentaux.
Et qui représente le mieux ce mouvement de rock progressif ? Pink Floyd bien évidemment. Mais je ne vais pas m’arrêter là, sur ces deux titres de Jean-Jacques Goldman “Puisque tu pars” et Peur de rien blues”, et d’ailleurs la version live de l’album Traces est encore plus signifiante pour illustrer ce que je dis, ces solos et riffs de guitares sont de vraies performances scéniques.
Donc en fait, on avait un artiste français qui nous disait qu’il faisait juste de la variété française, alors qu’en réalité, on avait un vrai amoureux de la musique, de la composition et de la construction de titres qui redonnait dans ses titres ou ses interprétations ce qu’il avait écouté dans les années 60 ou 70. Et c’est là que je m’étonne qu’il n’ait jamais cité Pink Floyd, car beaucoup de ses titres, de ses compositions ou ses solos de guitares, étaient bien plus de la simple variété française, c’était digne de groupes anglos saxons de l’époque, et oui j’invite vraiment tout le monde à réécouter la version live de “Peur de rien blues” sur l’album Traces, c’est du pur rock progressif tel qu’il est définit et catégorisé par tous les spécialistes de ce mouvement, je n’invente rien, je fais juste un peu de recherche et d’analyse sur ce que j’ai devant moi.
Mais je ne vais pas m’arrêter là, en fait, si on analyse la discographie de Jean-Jacques Goldman, beaucoup de titres peuvent rentrer dans cette catégorie de rock progressif. “À quoi tu sers ?”, “Rouge” ou “fermer les yeux” sont des titres qui peuvent en effet aussi entrer dans cette catégorie tellement ils sont originaux et sortent de l’ordinaire, de ce que Jean-Jacques Goldman a pu produire. J’ai d’ailleurs toujours une oreille et écoute différente pour cet album Rouge. Pour moi, c’est un album à part, avec un son et des titres bien plus longs que sur les autres albums, et je trouve que c’est un album sur lequel il a le moins utilisé de rythmiques synthétiques.
Du New Morning au Zénith, et ces passages de rock progressif manifestes
C’est justement l’album live qui a suivi Rouge, qui m’a aussi permis cette réflexion sur les chansons de JJG. Pour moi, l’album “ Du new Morning au Zenith” fait partie de ses meilleurs albums en concerts et je vais vous dire pourquoi immédiatement. On comprend mieux les deux guitares collées sur la pochette du CD à l’époque en fait, car rétrocactivement, Jean-Jacques Goldman annonçait la couleur.
Le son est toujours aussi soigné, avec derrière les consoles Andy Scott comme pour la majorité des albums en concert et également cet album Rouge si particulier dans la discographie de Jean-Jacques Goldman, mais c’est cette ambiance blues rock, et ces liaisons entre les chansons, qui sont très soignées, et là encore, on peut parler de rock progressif sur pas mal de titres en fait.
Ne serait-ce que sur “Confidentiel”, cette fin de titre au clavier et cette guitare c’est de toute beauté, je pense que c’est Michaël sur sa Fender qui joue cette partie, mais sur ces différentes versions live, Jean-Jacques Goldman a voulu soigner les enchainements de titres avec des instrumentaux et arrangements différents, qui créent une ambiance très Pink Floydienne et rock progressif, avec de longues nappes de claviers / orgues et de la guitare. Là encore, je n’avance pas cela sans arguments, la liaison entre les titres “Je commence demain” et “Des vies” (titre qui sonne tant Dire Straits et Mark Knopfler) est selon moi le meilleur exemple de rock progressif français digne d’un live de Pink Floyd avec David Gilmour sur sa guitare, et la fin du titre est encore plus nette selon moi. La dernière minute trente de ce titre est vraiment significative, on sent que Jean-Jacques Goldman et Michaël Jones se sont fait plaisir sur cette tournée, et que cela se retrouve dans le rendu final. C'est tout simplement superbe et plus que de la simple variété française selon moi.
Je pourrais continuer longtemps à passer les titres de cet album Du New Morning au Zénith, mais les fins de titres ou les solos de guitares sont mémorables, comme c’est le cas aussi sur “On n’a pas changé” ou “Frères” que parfois, c’est à la limite de la saturation et distorsion du son. C,’est vraiment rock en fait, comme c’est le cas sur la fin du titre “fermer les yeux” avec ces guitares de Jean-Jacques et Michaël et la batterie de Christophe Deschamps, qui partent vers l’impro totale avec des couplets de certains classiques du rock (Stones, Kravitz...). J’invite vivement tout le monde à écouter ou réécouter cet album live “Du New-Morning au Zénith” car il vaut vraiment le détour, mais c’est le cas pour la plupart de ses enregistrements en concerts qui ont une énergie et un son bien moins froid qu’en studio, et les arrangements sont bien souvent faits pour sublimer encore plus le titre, qui finissent par sonner bien souvent plus rock et bruts que la version originale en studio.
Il y aura d’ailleurs la sortie en vinyles des deux dernières tournées (En passant + Un tour ensemble) qui vont sortir le 22 novembre 2024 histoire de combler quelques fans qui attendaient ces versions en vinyles pour les glisser sous le sapin.
J'espère donc avoir mis en lumière certains éléments, qui reliés, permettent d’avoir une vision plus claire de certaines influences ou références de cet acteur incontournable de la musique française qui continue de toucher le public au travers de ses chansons.
Il a cette capacité de mettre des mots français sur certaines de ses musiques qui sonnaient vraiment anglo-saxonnes, et c’est ce qui peut le caractériser le plus. Savoir construire, ciseler, des chansons populaires, et pour certaines de vrais morceaux de rock progressif comme j’ai pu le démontrer plus haut. Contrairement à beaucoup de journalistes ou critiques musicaux qui l’ont attaqué sur le fait qu’il avait un public très féminin dans les années 80, et s’arrêtaient juste à cela, je souhaitais justement aller plus loin, et analyser avec divers éléments à ma disposition, que Jean-Jacques Goldman n'est pas seulement un auto-compositeur et chanteur de variété française, et sa modestie et pudeur légendaire, n’a pas cherché vraiment à contredire cela. Si on regarde sa discographie et les titres qu’il a écrit et composé comme aussi “End of an End” pour Taï Phong (qui sonne très Supertramp) mais aussi la grande majorité des titres de l’album les années Warner ou “Ton autre chemin”, dernier titre un peu ovni de l’album Positif, ce sont des exemples concrets de sa capacité à créer des titres qui sortent du format radio 3’30 et qui explorent des sonorités et une dimension toute autre, et qui sont du rock progressif intrinséquement.
Je désirais également démontrer que, sur un bon nombre de titres, et notamment lors des versions en concert, on avait plus que de la simple variété française, qui peut être vue comme péjorative par certains, avec en l’occurrence, des titres construits et interprétés de telle manière, qu’ils peuvent être dignes de grands classiques de rock progressif.
Bonjour,
J'avais remarqué également l'intro de Puisque tu pars et l'emprunt à the wall.
On pourrait citer également le titre Ton autre chemin qui est très rock progressif.
Il ne faut pas oublier également que Tai Phong était un groupe de rock progressif avec le titre par exemple When it's the Season plus que tous les autres progressif.
C'est donc bien plus qu'une simple influence